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Interview

Johan Micoud : «Paris s’est mieux adapté que les autres»

L’ancien international tricolore fait le bilan d’une formule 2019-2020 de la Ligue des champions qui a peiné à lui «ficher le frisson».
A Lisbonne, mardi. (David Ramos/Photo David Ramos. AP)
publié le 21 août 2020 à 17h56
(mis à jour le 21 août 2020 à 19h56)

Ancien international tricolore (17 sélections) passé par Parme, Bordeaux ou encore le Werder Brême en Allemagne, avec qui il a disputé la Ligue des champions, actuellement consultant pour la chaîne l’Equipe, Johan Micoud porte son regard sur cette étrange édition de la Ligue des champions 2019-2020, qui s’achèvera ce dimanche avec la finale entre le Paris-SG et le Bayern Munich.

Quelle différence entre la Ligue des champions telle qu’on la connaissait et le tournoi disputé sur onze jours à Lisbonne ?

La formule sur match sec, sur terrain neutre et à huis clos. Là, c'est comme une Coupe du monde ou un Euro : tu rentres chez toi ou pas après chaque match, mais tu perds quelque chose au niveau de la sensation, de l'émotion. On avait coutume de dire qu'il faut aller chercher la Ligue des champions au-delà des limites, et l'atmosphère dégagée par le public doit t'aider à les franchir. Là… Pour moi, la Ligue des champions, ce sont les retournements de situation entre le match aller et le match retour, le 4-0 du FC Liverpool contre le FC Barcelone de Lionel Messi [en demi-finale la saison passée, ndlr] qui renverse le 0-3 encaissé deux semaines plus tôt. C'est un tout qui permet ça : le décorum, le bruit, le public… la musique de la Ligue des champions, qui fiche le frisson… A Lisbonne, on a perdu pas mal de choses. Le dénouement du match entre le Paris-SG et l'Atalanta Bergame [2-1, avec les Parisiens menés qui retournent la situation dans les arrêts de jeu] a permis de retrouver une intensité dramatique, les gens ont eu peur, ils ont vibré. Mais pas à la même échelle.

Le match sec ?

Il nivelle les valeurs. Je n’invente rien : c’est toute l’histoire de la Coupe de France.

Jusqu’à expliquer la présence de deux clubs français dans le dernier carré ?

Si tu as les mêmes que d'habitude en demi-finale, tu te dis bon, c'est pareil. Quand tu as le RB Leipzig [dont le meilleur résultat était une place en quart de finale de la modeste Ligue Europa en 2018], en revanche, j'ai tendance à penser que ce n'est pas anodin. Parmi les habitués, seul le Bayern Munich est au rendez-vous. On peut aussi se dire que le Paris-SG tourne autour depuis sept ou huit ans, qu'il est armé [financièrement, donc en termes d'effectif] pour ce niveau-là et qu'il y est enfin : les circonstances particulières ne lui enlèvent rien. Le sport de haut niveau, c'est l'adaptation aux circonstances : les Parisiens l'ont fait mieux que les autres, bravo à eux. Pour autant, on ne parle pas tout à fait de la même compétition.

L’intensité athlétique vous semble-t-elle au niveau des standards habituels ?

C’est ce qu’il y a de plus difficile à mesurer devant sa télé, je trouve. A titre personnel, je la trouve un peu moindre. A chacun de se faire sa propre idée.

Dans le détail ?

Les quatre équipes de la compétition qui ont bénéficié du plus de temps pour se préparer pour le tournoi de Lisbonne étaient en demi-finale : les deux équipes françaises (le Paris-SG et l'Olympique lyonnais), dont le championnat s'est arrêté définitivement mi-mars, et les deux équipes allemandes (le RB Leipzig et le Bayern Munich), qui ont repris en premier et qui en ont donc terminé le 27 juin, avec sept semaines devant elles pour préparer cette Ligue des champions. Dans les faits, ces équipes-là ont eu tout loisir de refaire une préparation physique, à l'image d'une sélection qui récupère les joueurs après la saison en club pour préparer une phase finale de championnat d'Europe ou de Coupe du monde. Mais avec, dans le cas des Allemands, le double de temps. A Lisbonne, ceux qui ont repris [et terminé] leur championnat plus tard étaient en difficulté. A la fin du match contre le Paris-Saint-Germain, les joueurs de Bergame étaient morts, rincés. Reprendre après trois mois d'inactivité, et à raison de trois matchs par semaine par-dessus le marché, est très, très difficile. Contre Manchester City [le 7 août, pour son match retour de 8e de finale], le Real Madrid n'avançait plus. A l'inverse, le Paris-SG a donné l'impression d'une montée en puissance athlétique planifiée, avec deux finales de Coupe [contre l'AS Saint-Etienne le 23 juillet, puis contre Lyon le 30] dans le dur puis un pic de forme ensuite, un peu comme une sélection qui rame lors du premier tour de poule avant de voler lors des matchs à élimination directe.

Qu’est-ce qui vous a plu durant ce tournoi ?

Neymar. Le meilleur joueur du monde aujourd’hui. Il a épuré son jeu, on ne voit plus les gestes parasites que l’on pouvait assimiler à une façon de chambrer. Tout est vertical, tout est fait pour faire mal à l’adversaire.

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