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Escalade

Etats-Unis : un supporteur de Trump tué à Portland

Membre d'un groupe d'extrême droite, l'homme a été abattu samedi soir après plusieurs heures de tensions entre partisans du Président et militants antiracistes.
Capture d'écran de la scène, à Portland, samedi soir. (Social Media/Photo Justin Dunlap via Reuters)
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publié le 30 août 2020 à 11h04
(mis à jour le 30 août 2020 à 13h04)

Faut-il y voir une alarmante escalade de la violence entre deux Amériques irréconciliables ? Ou une simple et tragique coïncidence ? Quelques jours après la mort à Kenosha (Wisconsin) de deux manifestants Black Lives Matter tués par un adolescent pro-Trump de 17 ans, un homme a été tué samedi soir à Portland (Oregon), épilogue d'une journée marquée par des heurts entre militants antiracistes et partisans du Président. La victime, dont l'identité et l'âge n'ont pas encore été révélés, appartenait semble-t-il au groupe d'extrême droite Patriot Prayer, qui soutient Donald Trump.

Depuis la mort fin mai à Minneapolis de George Floyd, asphyxié par un policier blanc, Portland, la plus blanche des grandes villes américaines, s'est affirmée comme l'un des bastions du mouvement pour la justice sociale et contre les discriminations raciales. Un mouvement relancé cette semaine par l'affaire Jacob Blake, grièvement blessé de plusieurs balles dans le dos à Kenosha.

Toutes les nuits depuis plus de trois mois, des protestataires se rassemblent à Portland pour dénoncer les violences policières. Début juillet, l’administration Trump y avait déployé des policiers fédéraux, contre l’avis du maire et de la gouverneure de l’Oregon, tous deux démocrates.

A de nombreuses reprises, Donald Trump a dénoncé le «chaos» et «l'anarchie» régnant selon lui dans la ville du nord-ouest du pays, connu pour son progressisme. Dans son discours d'investiture jeudi soir, en clôture de la convention républicaine, le Président l'a de nouveau érigée en contre-exemple, déclarant qu'en cas de victoire de Joe Biden à la présidentielle du 3 novembre, «toutes les villes ressembleront à Portland. Personne ne sera en sécurité dans l'Amérique de Biden».

Caravane pro-Trump

Samedi après-midi, répondant à un appel lancé sur Facebook, des centaines de partisans du Président se sont retrouvés sur le parking d'un centre commercial au sud-est de Portland. De là, le convoi de plusieurs centaines de pick-up et voitures, souvent surmontés de drapeaux américains, de pancartes «Trump 2020» ou affichant leur soutien à la police, se sont dirigés vers le centre-ville, où se trouvaient déjà de nombreux militants antiracistes et de la mouvance «antifa».

Selon les récits des médias locaux et les vidéos postées sur les réseaux sociaux, la tension est progressivement grimpée entre les deux camps. Copieusement insultés, des supporteurs de Trump ont visé les protestataires avec des fusils lançant des balles de peinture ou les ont aspergés de spray au poivre. Certains manifestants ont de leur côté jeté des œufs ou tenté de bloquer l'avancée de la caravane.

«Un rassemblement politique roule à travers le centre-ville de Portland. Il y a eu des violences entre manifestants et contre-manifestants. Des policiers sont intervenus et ont procédé dans certains cas à des arrestations», a tweeté peu après 17 heures, heure locale, la police de la ville.

Deux détonations

La suite des événements demeure floue. Vers 20 h 45, des tirs ont été signalés en plein centre-ville. Une vidéo supposée de la scène, d’assez mauvaise qualité et filmée de l’autre côté de la rue, montre un petit groupe de personnes devant ce qui ressemble à une sortie de parking. On y entend des cris, deux détonations, puis un homme s’effondre sur la rue.

Sur les photos prises juste après par le photographe Nathan Howard, et partagées sur Twitter par le reporter du New York Times Mike Baker, on voit un homme en short beige allongé sur le dos, inconscient, avec ce qui ressemble à une blessure par balle à la poitrine. Il porte un tee-shirt et une casquette du groupe Patriot Prayer, un groupe d'extrême droite connu pour son soutien à Donald Trump et son opposition récurrente, et parfois violente, aux manifestants associés à la gauche américaine. Sur Twitter, plusieurs comptes associés au mouvement Patriot Prayer ont semblé confirmer que la victime en faisait partie.

Dans un bref communiqué publié dans la nuit, la police de Portland a annoncé avoir ouvert une enquête pour «homicide» et lancé un appel à témoins pour tenter de déterminer les circonstances exactes du drame. Donald Trump, lui, s'est empressé de réagir sur Twitter, partageant et écrivant plusieurs messages reprochant au maire démocrate, Ted Wheeler, d'être responsable des événements de samedi, par son refus d'accepter le déploiement de forces fédérales.

Partageant une vidéo montrant notamment un membre du cortège pro-Trump tirant en rafales sur les manifestants avec son fusil à balles de peinture, le Président a semblé défendre ces actions. «Ce retour de flamme massif à Portland ne peut pas être inattendu après 95 jours à voir le maire incompétent admettre qu'il n'a aucune idée de ce qu'il fait. La population de Portland ne va pas tolérer plus longtemps l'absence de sécurité. Le maire est un IMBÉCILE. Déployez la Garde nationale !», a-t-il tweeté dimanche matin.