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Conflit

Afghanistan : nouvelle attaque meurtrière d'une prison par l'Etat islamique

Les jihadistes ont attaqué une prison de Jalalabad, dans l'est du pays. Environ 300 prisonniers se sont échappés et 29 personnes ont été tuées.
A Jalalabad, sur les lieux de l'attaque de l'Etat islamique. (PARWIZ/Photo Parwiz. Reuters)
publié le 3 août 2020 à 16h36
(mis à jour le 3 août 2020 à 16h53)

On le disait défait, cantonné à quelques districts de la province reculée de Kunar, dans le nord-est de l’Afghanistan. L’Etat islamique a lancé dimanche une attaque complexe et massive contre une prison de l’est du pays. Les combats se sont poursuivis jusqu’à lundi après-midi. Au moins 29 personnes ont été tuées et plus de 300 prisonniers se sont échappés, selon les autorités locales.

Attentats suicides dévastateurs

L’attaque a débuté dimanche soir avec l’explosion d’une voiture piégée à l’entrée de la prison de Jalalabad, capitale de la province de Nangarhar. Des jihadistes se sont ensuite engouffrés dans l’enceinte, tirant sur les gardes. D’autres assaillants, armés de lance-roquettes, s’étaient positionnés dans un marché voisin. Lundi, les forces de sécurité afghanes ont fini par encercler la prison pour abattre les jihadistes toujours présents à l’intérieur. Celle-ci comptait avant l’attaque près de 1 800 détenus, dont environ 500 membres de l’Etat islamique.

L’organisation est apparue en 2015 en Afghanistan. Elle a d’abord prospéré, s’installant notamment dans les provinces de Nangarhar, de Kunar et du Helmand (sud). Mais son expansion, faite d’attentats suicides dévastateurs, s’est heurtée non seulement aux frappes de l’armée américaine et aux opérations des forces afghanes, mais aussi à des offensives talibanes. Les insurgés ont rapidement vu l’Etat islamique comme un rival. Ils se sont coordonnés de manière informelle avec Kaboul pour le combattre.

Les combattants de l'Etat islamique ont reculé, perdant le Helmand, puis Nangarhar. Ils se sont alors retirés dans quelques districts de la province montagneuse de Kunar, à la frontière pakistanaise, tout en conservant des cellules dans plusieurs villes, dont Kaboul, la capitale. Selon un rapport de l'ONU, présenté le 16 juillet au Conseil de sécurité, l'Etat islamique compte aujourd'hui environ 2200 combattants dans le pays.

Pakistanais présents

Le groupe espère se renforcer en tirant parti de l'accord signé en février entre les Etats-Unis et les talibans, qui a abouti à un calendrier de retrait des forces américaines. L'Etat islamique dans la province du Khorassan, son nom dans la région, cherche désormais à attirer les insurgés hostiles à toute négociation avec Kaboul. Il peut également recruter des membres du Tehrik-e-Taliban Pakistan (TTP, les talibans pakistanais). L'ONU estime que l'Afghanistan abrite 6 000 à 6 500 combattants pakistanais, dont une majorité appartient au TTP.

L'attaque de Jalalabad a été commise aux dernières heures d'un cessez-le-feu instauré par les talibans, et suivi par les forces afghanes, pour la fête de l'Aïd. La trêve a été globalement respectée alors que les attaques insurgées, et les offensives de l'armée gouvernementale, avaient redoublé ces dernières semaines.

Le processus de paix, censé débuter en mars, juste après la signature de l'accord entre Washington et les talibans, n'a toujours pas été lancé. Il bute sur la libération de 5 000 prisonniers exigée par les insurgés. Il en reste environ 400 dans les prisons afghanes, considérés comme les plus dangereux. Le président Ashraf Ghani refuse de les relâcher et a proposé aux talibans d'en libérer 500 autres. Il a par ailleurs convoqué une Loya Jirga, une assemblée traditionnelle, qui devra décider s'il est possible de passer outre la Constitution et de relâcher les 400 détenus accusés de crimes graves réclamés par les insurgés. Elle devrait se réunir courant août.