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Italie

A Gênes, le nouveau pont Saint-Georges inauguré dans la colère

Moins de deux ans après l'effondrement du pont Morandi, qui a coûté la vie à 43 personnes, la nouvelle infrastructure vient d'être achevée. Mais les familles des victimes, absentes à l'inauguration de ce lundi, fustigent une célébration aux allures de «carnaval».
Le pont Saint-Georges à Gênes, ce lundi, jour de son inauguration. (ANDREAS SOLARO/Photo Andreas Solaro. AFP)
publié le 3 août 2020 à 15h32

Avant l'inauguration ce lundi, les derniers tests avaient été effectués avec succès. Et quelques camions avaient déjà pu s'assurer de la solidité du pont en y circulant le mois dernier. Il aura fallu un peu moins de deux ans pour redonner vie au mythique pont de Gênes, qui s'était en partie effondré le 14 août 2018. Même la crise sanitaire, qui a paralysé l'activité italienne pendant plusieurs mois, n'a pas eu d'incidence sur la poursuite de ce chantier phare.

43 piliers lumineux

Jadis dénommé Morandi, le nouveau pont en acier et béton armé porte désormais le nom de Saint-Georges. Sa construction est signée par l'architecte Renzo Piano, originaire de Gênes, qui a déjà à son actif le Centre Pompidou à Paris, ou encore le Whitney Museum of American Art à New York. S'étendant sur plus de mille mètres, le pont a les courbes d'un navire, référence subtile de l'architecte au port de la ville, et s'illumine aux couleurs du drapeau italien à la tombée de la nuit. Les 43 piliers lumineux qui le surplombent rappellent les 43 personnes mortes lors de la catastrophe de 2018.

Pour Gênes, ville portuaire au nord de l'Italie, lotie entre la montagne et la mer, l'ex-pont Morandi était un axe essentiel. Il assurait une connexion avec le reste de la région et permettait à des milliers de vacanciers d'atteindre la ville. Mais l'absence de cette liaison a limité l'approvisionnement de la cité, handicapant un peu plus l'économie locale sur fond de crise liée au Covid-19. La circulation s'est densifiée dans l'enceinte de la ville et les voitures habituées à emprunter le pont ont été contraintes de faire un long détour pour atteindre la frontière française.

«Une blessure qui cicatrisera difficilement»

Ce lundi, le président italien, Sergio Mattarella, et le Premier ministre, Giuseppe Conte, sont venus pour l'inauguration saluer la fin du chantier et observer une minute de silence pour les victimes, dont les noms seront lus à haute voix, vers 18h30, heure officielle de la cérémonie. Mais cette inauguration aura lieu en l'absence des familles des défunts. Ces dernières déplorent que «la tragédie se transforme en carnaval», selon les mots à l'AFP d'Egle Possetti, représentante du Comité des parents des victimes. Elles ont ainsi choisi de se rassembler à part, le 14 août, commémorant les deux ans de la tragédie. Comme chaque quatorzième jour du mois, elles déposeront un bouquet de fleurs en face du pont.

La restauration éclair rompt avec les autres projets d'infrastructures du pays, parfois marqués par des lenteurs, voire un enlisement bureaucratique. L'imposant viaduc entend s'ériger en symbole de l'excellence italienne. Et tourner la page des négligences d'entretien à l'origine de l'effondrement du pont précédent. «A partir d'une blessure qui cicatrisera difficilement, c'est le symbole d'une nouvelle Italie qui se relève», a déclaré dimanche sur Facebook le Premier ministre, Giuseppe Conte.