Faut-il croire Alejandra Ghersi quand elle raconte, en préambule explicatif au nouveau mini-album de son projet Arca, qu'il a nécessité la destruction d'un violoncelle acheté pour l'enregistrer ? Mille fois oui : la Vénézuélienne est du genre intense, et le morceau en son cœur, décliné en quatre versions mutantes qui vont du quasi symphonique à l'a cappella, n'en résonne que plus fort quand on sait qu'elle a donné pour Madre cent fois plus que ce qui est raisonnable pour faire advenir une chanson. Autre preuve de son engagement, Ghersi a troqué l'exhibition de son corps athlétique et surmonté d'apparats biomécaniques, qui fait la singularité de son existence médiatique dans l'inframonde électronique, contre celui d'anémones barbotant dans une soupe primordiale face au soleil levant. Le film, saisissant de beauté à défaut d'être totalement haletant, est l'œuvre d'Aron Sanchez, fin observateur de la faune du littoral californien qui n'en finit pas, sur son site Waterbody, de nous faire confondre corps organiques à hauteur de tentacule et paysages intergalactiques. Et il donne à la version la plus lente et opératique de Madre, hommage sanglant à une mère sublime et dévorante, des airs de stase dans un infini ambient, comme la fameuse Canzonetta Spirituale de l'ère baroque qu'on aurait diluée trois fois dans le mouvement imperceptible de l'aube, juste avant que le monde ne reprenne sa marche délirante. Peu importe la longueur de la liste de vos tâches à faire dans l'heure qui vient, trouvez-donc neuf minutes pour plonger dans cette eau tiède, vous ne le regretterez pas.
Clip
Arca en profondeurs
Image tirée du clip «Madre» d’Arca réalisé par Aron Sanchez, sur YouTube. (Photo DR)
par Olivier Lamm
publié le 29 janvier 2021 à 17h06
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