De nouvelles règles sanitaires dans les entreprises «d'ici à la fin août», notamment le «port obligatoire du masque» dans certaines situations. Après une première réunion vendredi et un nouveau rendez-vous avec les partenaires sociaux prévu mardi, la ministre du Travail, Elisabeth Borne, a accordé dimanche un entretien au JDD, pour préparer les esprits.
Abattoirs
Dans un contexte de recrudescence de l’épidémie, le Premier ministre, Jean Castex, avait mis sur la table dès le 11 août, lors d’une visite au CHU de Montpellier, le sujet du masque obligatoire sur le lieu de travail, alors que Santé publique France souligne que 22 % des clusters s’y situent.
«On doit adapter le protocole de déconfinement à une période de long terme. Il faut renouveler les critères pour que les salariés ne soient pas exposés au virus» , reconnaît Yvan Ricordeau, secrétaire national de la CFDT. Côté patrons, Laurent Munerot, président de l'Union des entreprises de proximité (U2P), explique que les employeurs «doivent être conscients du risque juridique et économique». Stéphanie Pauzat, vice-présidente déléguée de la CPME, abonde : «Le masque est un défi pour les petites et moyennes entreprises. Même s'il a un coût, la santé des salariés doit être prise en compte et nous devons absolument éviter un reconfinement pour ne pas stopper l'activité.»
Tous les syndicats interrogés ne font pas du masque un enjeu primordial. «Le masque ne doit pas être l'alpha et l'oméga de la protection», met en garde Véronique Martin, membre du bureau exécutif de la CGT. Ils rejettent tous une obligation nationale, à laquelle ils préfèrent des négociations au plus près de la réalité des branches et des entreprises. Pour la CGT, il y a urgence : «Il faut que le cadre national soit fixé au plus vite, pour permettre de lancer les négociations de branche et les discussions au plus petit niveau». «On attend des décisions par secteur et équilibrées», ajoute Stéphanie Pauzat (CPME). Si, dans certains cas, les salariés disposent de bureaux individuels ou peuvent aérer leurs espaces de travail, il existe aussi «des situations [où] le port du masque n'est pas l'unique rempart. On voit que dans les abattoirs, il n'a pas suffi», regrette Yvan Ricordeau (CFDT).
«Fractures». La question du port du masque soulève celle du contrôle interne des mesures en place dans les entreprises. «Avec la loi Macron et les ordonnances travail, on a fondu les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) dans les comités sociaux d'entreprise (CSE). Aujourd'hui, il faudrait rétablir les CHSCT pour améliorer l'efficacité des mesures anti-Covid», plaide Yves Veyrier, leader de FO. La CFE-CGC propose, elle, la création d'une instance spécifique dans l'entreprise.
Se pose aussi la question de l'espace de travail. «On doit pouvoir savoir quels endroits sont les plus exposés et adapter les postes de travail en fonction», réclame Yves Veyrier (FO). Une demande partagée par Gérard Mardiné (CFE-CGC) qui déplore n'avoir «aucune information sur ces clusters en entreprise et sur le mode de transmission et de propagation». Tous savent aussi que la question du télétravail va se reposer pour éviter la concentration de salariés au bureau. Si Stéphanie Pauzat (CPME) avertit que «le télétravail peut créer des fractures dans l'entreprise», les syndicats de salariés attendent de pied ferme la renégociation de l'accord interprofessionnel pour améliorer son cadre légal.