Cher monsieur Chapel,
Cette nuit, on a fait un rêve après avoir refermé le livre l'Esprit Chapel (1), qui vient d'être publié, trente ans après votre disparition, en 1990, à l'âge de 52 ans. On est un jour frisquet sur un quai de la gare de Lyon Part-Dieu à prendre la micheline. Oh, pas pour un grand voyage en kilomètres. A peine une vingtaine jusqu'à Mionnay, un bourg de l'Ain aux portes de la Dombes. On irait ensuite à pied jusqu'aux murs dorés de votre maison inoubliable. La boule plutôt que la faim au ventre. Pensez donc, refaire le voyage à Mionnay. Comme toutes celles et ceux qui aujourd'hui, encore et toujours, prononcent votre nom ou plutôt le murmurent avec émotion, comme les chefs étoilés Pierre Troisgros, Pierre Gagnaire, Alain Ducasse, le fermier-aubergiste Frédéric Ménager, le vigneron jurassien Pierre Overnoy.
«Capter le souvenir»
Vous n'êtes pas un fantôme monsieur Chapel, encore moins une divinité du panthéon gastronomique juste un être qui «allait au fond des choses» comme vous aimiez le répéter avec la complicité de votre épouse Suzanne à qui l'Esprit Chapel doit tant et qui un jour expliqua : «Il faut démythifier Chapel, non pour le banaliser mais pour comprendre sa quête de simplicité.» (2).
Sûr qu'en arrivant devant votre porte, de votre vivant, on se serait arrêté devant le menu de saison, dédié ces temps-ci à la truffe avec son «moelleux de cardons, de truffes croquantes et coquilles saint-jacques poêlées», sa «tranche de foie